On préconise d'avoir un zafu épais car ça facilite la bascule du bassin en avant mais, surtout, ça permet à la posture d'être un équilibre et non pas quelque chose de fixe.
Le déséquilibre permet la subtilité, permet l'intimité, permet la nuance, permet l'erreur, permet l'équilibre, permet la liberté.
Une ancienne disciple de maître Deshimaru enseigne la posture comme étant un équilibre d'os.
Ainsi la posture est un miroir de notre esprit. Alors zazen peut être désagréable. Par exemple, lutter contre le sommeil en zazen est très difficile. Avoir un zafu épais est plus simple parce que dès qu'on tombe dans le sommeil on tombe directement devant, c'est encore plus désagréable que de lutter avec sa volonté, mais c'est plus bref. Du coup, ça nous réveille plus rapidement et plus efficacement. Il en est de même des pensées qui entraînent notre corps vers l'avant, la tête, les épaules, les pouces.
Maître Deshimaru disait que la science permet d'expliquer très simplement et efficacement zazen. Il utilisait le concept biologique d'homéostasie qui n'a pas été encore remis en question par la science, qui est celle de la recherche naturelle du corps à l'équilibre. Les psychologues aussi ont ce concept d'homéostasie, celle de l'esprit à trouver sans cesse l'équilibre. C'est ce que Bouddha, après toutes ces pérégrinations de recherche spirituelle, d'ascèse, a expérimenté. Il s'est assis et tout est devenu limpide, évident.
(kinhin)
Concentrez-vous sur l'expiration, c'est-à-dire sur l'immobilité, plus que sur le mouvement de la marche ; nous ne sommes pas en qigong ou tai chi.
Pressez fortement sous le sternum avec la racine du pouce gauche. Et à la fin de l'expir, cette pression est relâchée, vous faites le petit pas, un petit pas vif, soudain.
Détendez-vous, relâchez les paupières. Vous n'avez pas besoin de beaucoup de lumière pour rester éveillé en kinhin.
Jean-Claude, le godo ancien disciple de Deshimaru qui dirigeait ce zazen, enseignait explicitement d'ouvrir les épaules et les relâcher en arrière.
(zazen)
Alors, les psychologues nous disent que pour atteindre cette homéostasie mentale celui ci nous ment allègrement, simplifie, déforme, recrée un petit monde confortable. Il ne faut pas faire de même avec la posture. La posture de zazen n'est pas celle du canapé, mais ce n'est pas non plus celui du garde à vous militaire.
Naturellement, notre expérience de zazen n'a pas de limite dans le temps. Cette conscience ne se limite pas au dojo, au temps de zazen proprement dit. Cette homéostasie là, maître Deshimaru l'appelait le retour à la condition normale du corps et de l'esprit.
Kyosaku
La conscience ce n'est pas langage1
nous dit Maître Tozan. Il nous dit une évidence en zazen. La conscience dont il s'agit n'a pas nécessairement besoin de mots. L'homéostasie n'a pas nécessairement besoin de votre intervention, de votre contrôle.
Ce matin, le godo, Philippe, mon maître, a une fois de plus critiqué la société. C'est quoi la société ? Les autres ? La première société à contrôler ? C'est celle qu'on a avec soi-même.
Zazen a ce pouvoir-là, mais ce n'est pas facile. On a la satisfaction profonde de faire ce qui est juste2. La société ne nous applaudira pas. Il n'en a pas été le cas pour Bouddha, ni pour Dogen, ni pour Deshimaru. Il n'y a pas de raison pour que ça change pour nous.
1 Hokyo Zanmai 3
2 praśrabdhi en sanskrit : « la confiance » dans le sens de « sentiment intime d'avoir fait ce que l'on avait à faire » (Bernard Poirier, ancien disciple de Deshimaru)